LES CROIX ET LES ROGATIONS

Nous nous sommes souvent étonnés de la présence des croix à la croisée des chemins. Ces dernières répondent à une tradition lointaine pour protéger les champs, les récoltes et le bétail.

Les Rogations sont des prières publiques et solennelles pour bénir les biens de la terre. Le terme « Rogation » vient du verbe latin « rogare », c’est-à-dire « demander, implorer ». Les jours des Rogations sont dans le calendrier liturgique tridentin les trois jours précédents le jeudi de l’ascension, c’est-à-dire, le 37ième, 38ième et le 39ième jour après Pâques.  


A l’origine, les romains priaient le dieu ROBIGO ou ROBIGUS, dieu des fruits et des champs, pour protéger les cultures de la rouille (en latin rubigo or robigo). La rouille est une maladie attaquant les céréales et plus particulièrement le blé. Il s’agit d’un champignon développant une spore secondaire infectant la céréale. Dans l’année 474, les vallées du Rhône et du Dauphiné furent menacées par la rouille. St. Mamert, évêque de Vienne ordonna alors un jeûne de trois jours et institua des litanies mineures et, par miracle, la rouille disparut. Au premier jour des rogations, on priait pour les prés, au deuxième pour les champs et au troisième pour les vignes et le bétail.

Nous comprenons facilement pourquoi les gens de l’époque invoquaient la bénédiction du Dieu Tout-Puissant, Père, Fils, Saint-Esprit et tous les Saints. Au 6ème siècle un des petits-fils de Clovis en ordonna la célébration dans son royaume et dans les nouvelles églises de la Germanie. Aujourd’hui en France depuis Vatican II rien est fixé, c’est-à-dire que chaque diocèse ou paroisse est libre de célébrer la “Robigalia” (fête organisée lors des rogations) quand bon lui semble. En 2019, 22 villages dans toute la France ont célébré les Rogations. Les plus proches de Saurat se situent en Haute-Garonne à Drudas, paroisse de Notre Dame de GRANDSELVE. Comparé à d’autres pays, les prières pour les récoltes sont un rite très répandu et important chez les protestants et les catholiques d’Allemagne. 

A Saurat on cultivait seigle, blé, orge, sarazin, avoine et maïs dont la paille servait à protéger les pierres à aiguiser durant leur transport. Qui assistait aux rogations qui commençaient à 7 heures le matin ? Il y avait surtout les vieilles femmes qui travaillaient à proximité de leur maison. Les paysans et paysannes y assistaient, ainsi que les enfants, car l’école ne commençait qu’à 8 heures 30. Les ouvriers et leurs femmes y participaient rarement. Les processions étaient menées par le Curé. Le parcours, en général, commençait à l’Église Ste Madeleine et se poursuivait comme suit : 

  • Place St Jean-Baptiste (Christ),
  • Le long des Rives (Piquemal),
  • Croix en pierre n° 2,
  • Croix aux Quatre chemins n° 3,
  • Place de SEOURE croix en fer n° 4,
  • Place Cazals,
  • Place Tilleuls croix n° 5,
  • Chapelle Bleue n° 6.

 La procession se terminait à la chapelle Bleue. Les croix étaient fleuries par les gens de chaque quartier. On récitait les chapelets, des prières, comme par exemple les “litanies mineures”. Des chanteuses accompagnaient les participants aux rogations. On évoquait les Saints et surtout la Vierge. Pendant les jours des rogations on visitait aussi les autres croix. A Saurat, village millénaire, les Rogations se sont faites pendant 1000 ans !

Lors des rogations, la procession religieuse s'allongeait souvent sur plusieurs centaines de mètres, avec en tête le curé de la paroisse et les enfants de chœur portant des drapeaux.

Tout comme l’on chante les messes, les chants portent la procession en honorant Dieu ou des personnalités de l'histoire religieuse locale issues des livres sacrées.